mardi 29 juillet 2008

Communiqué de RefusADN Rouen

suite au procès en appel du 23 juillet pour refus de prélèvement biologique (en délibéré au 1er octobre)
Le totalitarisme n'est pas une dérive du contrôle social mais bien son essence

Le 1er octobre tombera un nouveau verdict, une nouvelle sanction. Même une relaxe sanctionne. Elle dit « c'est bon, vous êtes libre d'aller, l'État ne vous réclame rien — pour cette fois ». Mais après la relaxe peut venir l'appel du parquet, comme ce fut le cas l'été dernier. Et quand bien même il n'y aurait « qu'un » procès, tout cela c'est du temps et de l'argent, de l'énergie, de la force, que l'État et sa Justice te pompent, exigent que tu leur sacrifies.
Heureusement il y a la lutte, la chance de briser l'isolement, de pouvoir s'organiser pour ne pas rester seul face à la machine judiciaire. De recevoir des pétitions, que de parfaits inconnus, ou des gens que l'on connaît peu, ont fait signer à leurs parents, leurs amis, à un concert, une soirée. D'organiser des débats, des projections, des concerts de solidarité. De rencontrer des collectifs qui luttent et travaillent depuis quelque temps sur ce qui t'arrive, et qui en a frappé d'autres avant toi. Le « refus de prélèvement biologique » s'inscrit dans une lutte plus large contre la biométrie et le contrôle social. Une chance : cette lutte est à l’évidence plus facilement compréhensible que celles contre la prison, les centres de rétentions, contre le salariat, ou l'État. Bien souvent ceux qui luttent contre tout cela se retrouvent plus isolés que jamais. Mais il faut se dire qu'il existe dans ce monde des amis, des camarades de lutte, qui toujours prendront parti à nos côtés. La solidarité, dans cette société policée où tout acte militant, tout acte politique, tend à être criminalisé, est plus que jamais une arme. Heureusement qu'il y a la lutte.
Depuis quelques années, après Octobre et ses émeutes des banlieues, le CPE et son conflit qui se généralisait, les élections et leurs « manifs anti-Sarko », le mouvement contre la LRU et sa solidarité avec les cheminots, le pouvoir cherche à écraser la révolte. Et demain les nouvelles luttes n'échapperont pas au rouleau compresseur de la justice d'État, à la mise à l'amende judiciaire et financière. Tous ceux qui ne veulent pas être mis au travail, à l’heure où il est évident que le monde du travail et la société de la « croissance » courent à notre perte, doivent s'attendre à être la cible du contrôle social. RG, fichage ADN, depuis peu le système EDVIGE, autant de ressources dont dispose la police pour l’exercice de ce contrôle. Pas besoin d'une dictature pour que les citoyens soient fichés, espionnés et suspectés à loisir, les démocraties occidentales font ça très bien.
On peut dire en un sens que les « moyens » de contrôle sont également une fin en soi. La biométrie, par exemple, est un nouvel outil de domination, composé de tout un ensemble de technologies de pointe et de dispositifs individualisants : portiques, bornes, scans, etc., sans compter les téléphones portables, GPS, et autres puces RFID qui permettent un suivi précis de tous nos déplacements, de toutes nos activités. Mais la biométrie, dans le même temps, porte en elle le projet d’une société dans laquelle le vivant sera parfaitement objectivé, mesurable, chosifié : si la vie n'est pas encore tout à fait devenue une marchandise, elle n'en est pas moins d’ores et déjà considérée comme une donnée quantifiable, à laquelle on peut appliquer diverses règles de comparaison. L'identitifiabilité totale, chère au pouvoir, est réalisée par la biométrie en même temps que l'équivalence universelle, nécessaire au marché. Et cela n'a rien d'étonnant, au vu de l'étroite collusion entre les puissances étatiques et les marchés financiers. On imagine assez bien comment des compagnies privées, d’assurances par exemple, peuvent utiliser des fichiers biométriques établis en première instance par la police.

Refuser le fichage, ce n'est pas seulement vouloir éviter la sanction pour une éventuelle infraction. C'est surtout refuser la logique du contrôle, qui veut nous tenir constamment dans son collimateur, en citoyen, soumis et docile. Si le champ de la « criminalité » et de la « délinquance » ne cesse de s'étendre pour recouvrir un spectre de plus en plus large d'activités, il nous faut trouver des moyens, des actes et des énoncés permettant de lutter ensemble contre le contrôle social. Résister à la biométrie, c’est lutter contre le fichage et sa généralisation. C’est, pour cela, réfléchir aux liens qu’entretient le pouvoir avec le contrôle social, public ou privé, et à ceux que nous pouvons créer, pour nous soustraire à l’un comme à l’autre, tant il est clair que notre vie quotidienne leur échappe de moins en moins. C’est résister à l'avancée de la domination dans nos vies, dans nos rues, dans nos têtes. C’est donc penser le politique, non pas sous l’angle de la résignation et de l’attachement aux mesquines « libertés individuelles », mais dans la perspective de réaliser collectivement les conditions de notre liberté effective. Et pour cela, tisser des solidarités. Des caisses de soutien pendant les grèves, anti-répression dans les mouvements, des moments pour se rencontrer, discuter, et découvrir des amitiés qui nous permettent de tenir. De faire face, pour ne pas reculer. Ce n'est qu'ensemble que nous avancerons.
Nous appelons donc tous les collectifs, formels et informels, s'intéressant à la question du contrôle social au sens large, à multiplier les projections, débats, réunions publiques, sur des thèmes comme la biométrie, la vidéosurveillance, les puces RFID (identification par fréquence radio, dont sera équipée INES, la future carte d'identité française), les nanotechnologies et leurs applications. Il est important que de réflexions collectives naissent et s'articulent des idées et des pratiques, qui nous permettent d'en finir avec le mythe de l'insécurité, et de sa prétendue résolution par le pouvoir, à travers une gestion toujours plus intrusive de nos faits et gestes.
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